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Cinéma

Y’A DU CINÉ DANS L’AIR ! – N° 22

UNDER THE SKIN

de Jonathan Glazer (Scarlett Johansson, Jeremy McWilliams, Lynsey Taylor Mackay)

 

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Je crois vous avoir déjà touché quelques mots, lors de la sortie de « HER » de Spike Jonze, de ces cinéastes venant du clip et de la pub, capables du meilleur comme du pire.
Jonathan Glazer, lui, est plutôt dans le peloton de tête.
Après s’être illustré avec talent dans des réclames pour « Nike », « Kodak » ou encore « Volkswagen », il débuta en 2000 avec « SEXY BEAST », un étonnant polar centré autour du duo remarquable : Ray Winstone/Ben Kingsley.
Quatre ans après, il y eût « BIRTH », un drame, visuellement superbe mais inabouti, avec Nicole Kidman.
Puis une décennie s’écoula et voici qu’il revient avec « UNDER THE SKIN ».
Arrivant sur Terre pour nourrir son espèce, une extraterrestre, au volant d’un van, parcourt les routes et rencontre des hommes qu’elle séduit…
La fascination qu’exerce une personne sur une autre est un des thèmes centraux de Glazer, que ce soit dans « SEXY BEAST » (déjà le titre) où l’on est parfois proche de l’homosexualité parmi les gangsters montrés ou bien dans « BIRTH » où un jeune garçon, supposé être la réincarnation du défunt mari d’une grande bourgeoise, provoque l’attirance de cette dernière.
Ici, Scarlett Johansson (surprenante), mante religieuse d’un autre monde, charme inexorablement les êtres humains qu’elle croise.
Minimaliste, aux trouvailles esthétiques soignées (la photo, les décors naturels de l’Ecosse) et participant, tout comme la musique aux sonorités industrielles, à l’ambiance extrêmement forte se dégageant, voilà un bel et passionnant thriller de science-fiction (adaptant librement le roman à succès de Michel Faber) qui n’est pas sans évoquer, au détour d’un plan, le ton de « L’HOMME QUI VENAIT D’AILLEURS » et « NE VOUS RETOURNEZ PAS », tous deux de Nicolas Roeg.
Hormi Paul Brannigan (la révélation de « LA PART DES ANGES » de Ken Loach) dans une courte apparition, les autres « comédiens » sont de simples inconnus qui ne savaient pas du tout qu’ils étaient filmés, même lors de leurs scènes avec la star d’Hollywwod, augmentant ainsi le climat d’étrangeté baignant l’entreprise.
Evitant tout exercice de style superflu (au contraire de « BIRTH ») et transcrivant avec délicatesse et profondeur le manque de communication entre les gens (Antonioni apprécierait) ainsi que la solitude que provoque notre société actuelle, « UNDER THE SKIN » est avant tout un vibrant manifeste sur le cycle de la vie (l’ouverture et le final se répondant du tac au tac).
Une expérience sensitive de chaque instant.

 

 

TRANSCENDANCE

de Wally Pfister (Johnny Depp, Rebecca Hall, Paul Bettany)

 

TRANSCENDANCE

Wally Pfister ?
C’est qui, il a fait quoi ?
Pas grand chose, c’est juste le chef opérateur attitré de Christopher Nolan. Il est notamment le responsable de la photo de « BATMAN BEGINS », « LE PRESTIGE », « THE DARK KNIGHT » et « INCEPTION » où il gagna l’Oscar.
Ah ouais, et pourquoi qu’on en parle ?
Ben, parce qu’aujourd’hui, dans les salles, sort « TRANSCENDANCE », ses débuts à la réalisation.
Will Caster (Johnny Depp) est un scientifique de renom ayant conçu le premier ordinateur doté d’une conscience, capable de réfléchir en toute autonomie. Lors d’un congrés, il est tué par des terroristes anti-technologie voyant dans son oeuvre une menace pour l’espèce humaine. Sa femme, Evelyn (Rebecca Hall) se sert alors de ses travaux pour transposer l’esprit de Will dans un super-computer. Contrôlant désormais tous les réseaux liés à internet, notre « transcendé » s’est fixé un objectif…
Formellement, on a droit a du Nolan « light » et c’est un des problèmes majeurs concernant « TRANSCENDANCE » : son manque flagrant de personnalité, malgré une réelle ambition, comme souvent lorsqu’un technicien ou acteur passe derrière la caméra.
Ajoutons-y un déficit d’originalité malgré quelques embryons intéressants d’arcs narratifs sous-exploités comme cette idée d’un quidam interpellant Evelyn et étant Will, non pas physiquement mais intérieurement.
La notion de « transhumanisme » (l’amélioration de l’Homme par les sciences et la technique), présentement exposée, enjeu à part entière, est parasitée par les atermoiements de certains protagonistes et dévie trop rapidement sur le questionnement de l’existence de Dieu ou du moins sur l’apparition d’une nouvelle forme de déification.
La plupart des comédiens, Morgan Freeman, Cilian Murphy, Paul Bettany, ne sont au plus que des prétextes sans intérêt pour une intrigue, au bout du compte, galvaudée.
Wally Pfister ?
Bof.

 

 

ZERO THEOREM

de Terry Gilliam (Christoph Waltz, Mélanie Thierry, Lucas Hedge)

 

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A la découverte de la bande-annonce, immédiatement, on s’était dit : « Tiens, ça rappelle fichtrement « BRAZIL » ».
Après une sélection à la Mostra de Venise et au festival de Marrakech, des échos mitigés, un distributeur français peu rassurant concernant sa stratégie d’exploitation, vint enfin le temps, il y a un mois, de pouvoir visionner « ZERO THEOREM », le nouvel opus de Terry Giliam.
Qohen Leth (Christoph Waltz), surdoué de l’informatique, travaille tel un reclus dans une chapelle londonnienne désaffectée lui servant de bureau et d’habitation. Attendant désespérément un appel téléphonique censé lui donner les réponses aux nombreuses questions qu’il se pose, notre génie se voit proposer par Management (Matt Damon), l’autorité omnipotente qui gère le pays, la possibilté de décrypter la notion même de l’Existence et de découvrir à quoi elle peut bien servir…
On peut penser légitimement l’ex-Monthy Python maudit depuis ses échecs répétés concernant sa version de « DON QUICHOTTE » (projet remis récemment au goût du jour) et sa carrière, depuis « LA VEGAS PARANO », alterne entre le médiocre (« LES FRERES GRIMM »), le moyen (« TIDELAND ») et l’assez réussi (« L’IMAGINARIUM DU DOCTEUR PARNASSUS »). Là, il revient clairement à un univers qu’il est censé maîtrisé puisque selon l’intéressé lui-même, il faut appréhender ce « ZERO THEOREM » comme une version moderne de son chef-d’oeuvre ultime, « BRAZIL ».
Hors, même en ayant cela en tête, outre les décors et les costumes, faisant parfois plus penser à son génial « BANDITS, BANDITS » qu’à son « classique » de 1985, force est de constater que le fond comme la forme sont quelque peu réduits au minimum syndical.
Car si par petites touches, on retrouve bien la patte esthétique de l’auteur de « L’ARMEE DES 12 SINGES », il n’en est de même pour une narration assez plate et de fluidité dans les enchaînements de séquences (même si certaines sont très belles à l’instar des scènes de plage, renvoyant à un certain âge d’or américain).
Tout au long du métrage, plane une superficialité tant au niveau de la psychologie des principaux caractères, faiblards, que leur relation entre eux (par exemple la romance de Christoph Waltz et Mélanie Thierry, avec son perso pourtant intéressant de prostituée au grand coeur, ne fonctionne pas).
En définitive, nous assistons à un « pot-pourri » de l’oeuvre de Gilliam, un brin systématique, forcé parfois, pas entièrement désagréable mais manquant cruellement de lyrisme et symptomatique du combat quotidien que doit livrer le plus grand héritier de Mélies.

 

PS : Si jamais, votre multiplexe (peu probable) ou votre bastion d’art et essai programme « AUX MAINS DES HOMMES » de l’allemande Katrin Gebbe, découvert à un Certain Regard à Cannes en 2013, précipitez-vous.
Vous assiterez alors à un drame asphyxiant et dérangeant sur Tore, un jeune cherchant une nouvelle vie au sein d’un groupe religieux et qui va rencontrer un père de famille décidant de le prendre sous son aile.
Je ne vous en dis pas plus mais sachez que vous risquez de ne pas en ressortir indemne.

 

 

DVD de la semaine : «KRIMINAL»/«LE RETOUR DE KRIMINAL»

de UmbertoLenzi/Fernando Cerchio chez Artus Films.

 

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La littérature de gare a toujours remporté un succès considérable dans l’Hexagone comme dans la plupart des autres pays européens.
Mais en Italie, à côté des romans policiers bon marché que l’on lisait avec délectation, apparurent au début du siècle dernier, les «Fumetti», à savoir des petits fascicules de bande-dessinée publiant au départ du matériel américain mais développant rapidement des talents locaux, dont l’éditeur BONELLI (DYLAN DOG) est le plus fameux, et qui connurent un incroyable succès populaire, avec un âge d’or dans les sixties où sexe, sang et violence firent bon ménage et tâche d’huile dans d’autres états.
Evidemment, les producteurs de cinéma, toujours à l’affût des bons coups, enclenchèrent, dès lors, toute une série d’adaptations, le plus souvent transalpines d’une poignée de super-héros ou super-vilains, au choix, qui rendaient la justice à leur façon, souvent de manière expéditive.
ARTUS FILMS, après un «SATANIK» de haute tenue, persévère dans une nouvelle collection de DVD consacrée aux exploits de ces audacieux.
Crée en 1963 par un véritable stakahnoviste du genre, Max Bunker (de son vrai nom Luciano Secchi), pour concurrencer DIABOLIK, un autre vengeur, KRIMINAL, sous le trait classique et inspiré de l’immense dessinateur Magnus (à quand une édition française de «I BRIGANTI» ?), connu les honneurs d’une version sur grand écran en 66 signée Umberto Lenzi.
«KRIMINAL» narre les aventures d’un homme cynique, génie du mal, tombeur de la gente féminine digne de «JAMES BOND», qui, pour accomplir ses méfaits et effrayer ses victimes revêt un costume de squelette. Volontiers sadique, tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins. Ici, le voilà embarqué, après avoir échappé à la pendaison, dans une affaire d’escroquerie autour de diamants.
Lenzi, légende encore vivante du «bis» italien, ayant touché avec un égal bonheur à tous les courants (péplum, western, giallo…) livre une agréable série B, tournée en partie en Turquie, à la musique pop et jazzy. Incarnant cette déclinaison violente de «FANTOMAS», le hollandais Glenn Saxson (qui termina producteur de film érotique), sorte de doublure de Franco Nero, est entourée pour l’occasion de la sculpturale Helga Liné, actrice culte des amateurs du genre et d’Andrea Bosic, comédien important de théâtre.
Enclenché dans la foulée, «LE RETOUR DE KRIMINAL» dû à Fernando Cerchio, petit maître à redécouvrir, reprend exactement là ou le premier film s’arrêtait, avec la même équipe technique et lance notre trublion masqué à la recherche de toiles de Rembrandt et Goya enfouis dans une tombe archéologique. Plus rythmé et savoureux que le Lenzi.
Les copies proposées sont de bonne qualité en dépit de certains fourmillements en arrière-plan, mais n’empêchant nullement de passer un excellent moment de détente. Les bonus vont du pertinent, interview d’Umberto Lenzi qui se dévoile quelque peu, à l’anecdotique pour les fins connaisseurs : retour assez fastidieux sur la carrière de Lenzi par David Didelot, et une présentation de Curd Ridel, en progrès certes mais pouvant mieux faire.
Mais maintenant silence, car dans l’ombre, impitoyable, KRIMINAL veille…

 

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