PAN (3D)
de Joe Wright (Levi Miller, Hugh Jackman, Rooney Mara)
Apparu en littérature au tout début du XIXe siècle, le personnage de Peter Pan – crée par l’écrivain écossais J.M. Barrie – était loin de se douter du succès qui l’attendait, entre théâtre et grand écran.
Dès le muet, en 1924, nous eûmes droit dans à une version poétique où notre héros fabuleux était interprétée par une femme.
S’ensuivit, entre autres, le classique dessin animé de Walt Disney de 53, puis une comédie musicale assez kitsch – une curiosité – où Mia Farrow, pas encore la compagne de Woody Allen (nous sommes en 1976), poussait la chansonnette, le sous-estimé « HOOK OU LA REVANCHE DU CAPITAINE CROCHET » de Steven Spielberg, avec Dustin Hoffman qui cabotinait pour notre plus grand plaisir, et, en 2003, un film correct de P.J. Hogan.
Signalons, centré autour du créateur de Peter Pan, le poussif « NEVERLAND » de Marc Foster où Johnny Depp, campant Barrie, était peu convaincant.
Autant dire qu’amener de la nouveauté au mythe, sans en trahir l’esprit, s’apparentait à une véritable gageure.
Pourtant, un fou génial, Joe Wright, a relevé le défi.
Londres. Seconde Guerre Mondiale. Peter, abandonné à la naissance est pensionnaire dans un établissement pour orphelin, dirigé par une mère supérieure acariâtre. Chaque nuit, des enfants disparaissent mystérieusement. Lors d’un bombardement par les forces de l’Axe, il découvre que les ravisseurs ne sont autre que des pirates voyageant sur un galion volant dans les airs. Capturé à son tour, il est emmené vers le Pays Imaginaire où l’attend de trépidantes aventures…
Je pensais ne plus jamais avoir de nouveau dix ans, âge que j’avais lors de la découverte de « RETOUR VERS LE FUTUR » à l’époque, en salle, et de ressentir les mêmes sensations qu’alors.
Dès le départ, nous sommes embarqués dans un superbe train fantôme où les partis-pris visuels et esthétiques ne cessent d’étonner, en cette période d’uniformisation.
D’une ambiance très dickensienne, nous voguons ensuite vers un climat très « STAR WARS » lors d’une séquence de haute volée où des avions alliés tentent d’abattre, au dessus de Big Ben, le navire suspendu des kidnappeurs, avant d’atterrir dans une contrée mirifique où le gros de l’action va se dérouler – le final sera ébouriffant.
Là, nous faisons la connaissance de Barbe-Noire, joué par un Hugh Jackman, digne, réjouissant et inquiétant.
Un méchant à l’ancienne s’opposant à Peter (le jeune Levi Miller est parfait dans le rôle).
Puis des fées et leurs gardiens pointent le bout de leurs nez, un crocodile géant, un endroit secret, des trahisons, des mensonges, mais surtout de l’action.
Et de l’excellente.
De celle qui accroche, qui émerveille, qui marque.
Wright a une carrière qui me fascine, sautant par exemple d’une adaptation soignée et solide d’un livre de Jane Austen (« ORGUEIL ET PRÉJUGÉS ») à une nouvelle mouture d' »ANNA KARENINE », très réussie, à la mise en scène brillante, tout en passant par un conte initiatique trouble et entêtant (« HANNA »).
En fait, c’est un anarchiste à sa manière.
Il ose des films « autres », presque anachroniques dans la production de maintenant.
Ici, l’utilisation de SMELLS LIKE TEEN SPIRIT de Nirvana est particulièrement bien trouvée, et la 3D est redoutable d’efficacité, car pensée avec soin en amont du projet, et surtout jamais elle ne prend le pas sur l’histoire mais, au contraire, la sert au mieux.
Échec cinglant aux box-office américain (à l’instar, hélas, d’un « JOHN CARTER »), ce premier volet d’une trilogie restera manifestement sans suite.
Pourtant, « PAN » est une merveilleuse machine à remonter le temps.
Que c’est chouette d’avoir de nouveau dix ans…
MON ROI
de Maïwenn (Emmanuelle Bercot, Vincent Cassel, Louis Garrel)
Suite à une sévère chute de ski, Tony, la quarantaine bien entamée, est admise dans un centre de rééducation. Entre prise quotidienne d’antidouleurs, liens d’amitiés avec d’autres patients et rencontre du personnel médical, elle se remémore sa rencontre avec Georgio et la tumultueuse histoire d’amour qui s’en est suivi, en essayant encore de comprendre…
Si « LE BAL DES ACTRICES » et « POLISSE » n’étaient pas dénués d’indéniables qualités, il n’en est pas de même avec « MON ROI », ouvertement autobiographique, où Maïwenn frise présentement l’hystérie, personnalisée par Emmanuelle Bercot – pour l’occasion, lauréate incompréhensible d’un prix d’interprétation cannois – tout en outrance, opposée à Vincent Cassel, suave et manipulateur délicieux, le seul attrait de ce long métrage exténuant.
On passera sur les erreurs de casting (Norman !).
Une ou deux scènes, néanmoins, à sauver mais cela reste bien trop famélique pour cette galette de (mon) roi trop cuite.
SEUL SUR MARS (3D)
de Ridley Scott (Matt Damon, Chiwetel Ejiofor, Jessica Chastain)
Si Ridley Scott arrive encore à vous convaincre, passez votre chemin.
Ce qui suit est terrible.
Car, dernièrement, entre le pitoyable « PROMETHEUS », le risible « EXODUS » ou le faussement malin « CARTEL », que voulez-vous donc sauver ?
Pour faire vite, on garde ses quatre premières réalisations (« LES DUELLISTES », « ALIEN », « BLADE RUNNER », « LEGEND » version longue), un bout de « THELMA ET LOUISE », l’immersion de « LA CHUTE DU FAUCON NOIR » (en dépit du discours condamnable), la musique de « GLADIATOR » et puis… non, en fait, c’est tout.
Certes, par rapport à certains, c’est pas mal.
Etonnamment, étrange paradoxe, on continue à y croire alors qu’au fond de nous, nous savons que ses heures de gloires sont révolues.
En attendant sa propre suite d' »ALIEN », il renoue avec l’espace – comme pour mieux se préparer – avec « SEUL SUR MARS ».
Une équipe de scientifiques termine tranquillement leur expédition sur la planète rouge lorsqu’une terrible tempête les oblige à précipiter leur départ. Au cours du chaos qui s’ensuit, ils parviennent à décoller mais l’un d’eux, Mark Watney, botaniste, touché par un fragment de fuselage, est laissé pour mort. Malgré tout, celui-ci à survécu et se retrouvant donc isolé, au sein d’un environnement hostile, sans moyen pour repartir, va – grâce à son ingéniosité – tenter de contacter la Terre et de rester vivant…
Tiré du bon roman éponyme d’Andy Weir, papy Scott (77 ans) échoue, une fois de plus, à passionner.
Censé être poignant, « THE MARTIAN » (titre original) est saupoudré d’instants comiques désamorçant tout effet dramatique et quelques peu redondants (exemple, notre malheureux a comme seule bande-son, une compilation de tubes disco laissée par un de ses coéquipiers, et évidemment, le spectateur aura droit – tel un running gag – à chacun des morceaux, et même à « SPACE ODDITY » de David Bowie – tiens, on l’avait pas vu venir !)
Matt Damon peut amuser cinq minutes en MacGyver s’en sortant grâce à ses excréments mais finit par lasser.
Sur Terre, la NASA, s’apercevant que le présumé disparu est bel et bien toujours de ce monde, s’active pour monter une mission de secours et là, nous avons droit à une succession de poncifs opposant le cynisme des dirigeants de la vénérable agence spatiale de l’Oncle Sam à l’humanisme le plus béat des employés.
Aucun des enjeux exposés ne prend faute d’un manque de conviction flagrant et d’une capacité à se concentrer sur un axe bien défini.
Cependant, l’ultime demi-heure des 2 h 25 (le déroulement du sauvetage proprement dit), laisse entrevoir brièvement ce qu’aurait du être « SEUL SUR MARS » : un dérivé agréable de « GRAVITY », et non un ersatz inutile du déjà vain « INTERSTELLAR ».
ADAMA
de Simon Rouby (avec les voix de Azize Diabate, Oxmo Puccino, Pascal Nzonzi)
Habitant dans un village isolée de l’Afrique de l’Ouest, Adama, 12 ans, décide de partir à la recherche de son frère, disparu dans le Monde des Souffles, un endroit se situant au delà des falaises et interdit par les anciens…
Véritable « melting-pot » artistique réunissant des malgaches, des cubains, des réunionnais et des français de métropole (une soixantaine de personnes en tout), utilisant différentes techniques comme la peinture, le dessin ou l’encre magnétique, la 3D, ce film d’animation est une splendeur absolue rendant hommage aux tirailleurs sénégalais ayant combattu durant la guerre 14-18, à travers une quête initiatique magique.
Un tour de force étonnant que l’on doit à Simon Rouby, un nouveau venu qui frappe un grand coup.
Bien lui en pris.
LA GLACE ET LE CIEL
de Luc Jacquet (Claude Lorius, Michel Papineschi)
Honte sur moi.
Je connaissais mal l’importance et la carrière de Claude Lorius, glaciologue français.
Grâce à la « LA GLACE ET LE CIEL », oeuvre qui a été projetée en clôture du Festival de Cannes 2015, cette lacune est comblée.
Et de quelle manière.
Entre images d’archives, journal de bord, voix off de l’intéressé et sa présence, nous est dressé un joli et envoûtant documentaire, de son expédition en 1957 (à l’âge de 23 ans) de l’Antarctique jusqu’à nos jours, et de la naissance de sa passion pour l’étude des glaces qu’il sublima et qui permit de précieuses découvertes quant à la compréhension de l’évolution du climat du monde depuis des millénaires.
Alertant les autorités compétentes du risque de réchauffement climatique de la planète il y a déjà trente ans, ses prédictions se réalisent hélas de nos jours.
Jacquet (« LA MARCHE DE L’EMPEREUR ») nous plonge dans la vie de ce savant essentiel avec simplicité et une redoutable efficacité.
On passe par toutes les émotions.
Le but premier du cinéma.
L’affiche de la semaine : « 007 SPECTRE » de Sam Mendes.
Parce que l’attente est juste I-N-S-U-P-P-O-R-T-A-B-L-E !!!!