Rencontre avec Rodolphe (chanteur), Patrice (batterie), Yohan (guitare) de Belakane.
Le festival vous décrit comme un groupe de rock.
Ceux qui vous connaissent savent que vous n’êtes pas qu’un groupe de rock, votre musique est surtout faite de sonorités africaines.
Rodolphe : C’est du rock traversé par l’Afrique, on a dit ça de nous et j’aime bien cette idée de « traversée ». Je pense que c’est assez juste. On n’est pas des africains, on va pas jouer du soukouss comme des Congolais, on va pas jouer du mbalax comme des Sénégalais. On vient tous d’univers très différents. On joue avec plusieurs influences qui, effectivement, sont traversées par l’Afrique. Il y a aussi la chanson française, qui est très importante.
Rodolphe, tu écris les chansons pour Belakane, tu es également cinéaste.
Comment tu te situes au milieu de ces deux formes d’expression ?
Ça reste de l’écriture, que ce soit avec des mots ou avec des films. Il s’agit de langage, mais c’est assez différent. On ne dit pas les mêmes choses avec des images qu’avec des chansons.
Est-ce que tu utilises le film pour écrire une chanson et/ou réciproquement ?
Je n’y avais jamais pensé comme ça… Ce n’est pas le même media, mais en quelque sorte ça reste des jeux autour des mots. Que cela soit cinématographique ou musical, ça reste un travail de mots.
Vous les musiciens, comment prenez-vous place dans les propositions de Rodolphe ?
Patrice : On n’intervient pas du tout sur les paroles. Sur la musique, on n’intervient pas sur tout non plus. Il y a des morceaux qui étaient déjà écrits quand nous sommes arrivés sur le projet, des morceaux bien présents et biens finis.
Rodolphe : Il y avait déjà quelques compositions, maquettées, et après les musiciens s’en sont emparés pour y apporter leurs pattes.
Patrice : Nos jeux, nos influences respectives, nos sons sont venus créer autre chose. Ce n’est pas un seul travail d’arrangements. Chacun a apporté quelque chose, pour transformer les morceaux déjà existants.
Vous étiez déjà sensibles à cette musique un peu exotique, au sens strict du terme, avant de faire cette rencontre ?
Patrice : Moi oui, mais pas forcément par les mêmes canaux que Rodolphe, qui est plus porté sur la musique africaine traditionnelle. Perso, je jouais plus de sons d’Afrique du Nord. Ce sont les musiques que j’ai le plus étudiées.
Yohan : Pour les trois autres musiciens non. Nous n’étions pas du tout familiarisés avec ce genre musical. Le projet nous a plu. C’est aussi une histoire d’amitié.
Rodolphe : La difficulté a été, pour les guitares et basse, de réapprendre une façon de jouer. Quand tu as joué du punk pendant trente ans, c’est effectivement un peu compliqué au départ de se mettre à jouer du son congolais. Yohan vient plus du son hardcore, du math-rock où là il y a des choses qui peuvent effectivement résonner plus que depuis le punk.
Yohan : Oui, pour moi, c’était plus simple. Dans le placement rythmique, on retrouve des choses similaires. Mais sinon c’est un univers que j’ai découvert avec ce projet.
Vous tournez tous les cinq depuis combien de temps ?
Rodolphe : On a joué notre premier concert au Chato’do à Blois, il y a deux ans et demi environ.
Vous commencez à bien rayonner sur la région.
Vous allez aller jusqu’où comme ça ?
Vous comptez traverser la mer pour jouer en Afrique ?
Rodolphe : Ça serait bien qu’on sorte un peu de la région, où ce n’est pas simple pour les groupes dits de musique du monde. D’ailleurs, est-ce qu’on est un groupe de musique du monde ou pas ? Ces appellations, c’est toujours un peu compliqué d’en coller une comme ça. La région n’est pas très friande de ce type de courant. Il va peut-être falloir qu’on aille plus vers Paris. On verra bien. En tout cas, oui, on a envie d’aller voir ailleurs. Une visibilité comme Terres du Son c’est toujours bien pour ça. L’Afrique, c’était le but au départ, mais il faut de l’argent pour ça. Il y a des salles là-bas, ill y a des choses, mais il faut un tourneur. Sans ça, c’est plus compliqué, il faut être labellisé.
Là, vous êtes complètement indépendants.
C’est une volonté de votre part ?
Rodolphe : Nous sommes indépendants par la force des choses.
Patrice : C’est la vie d’un groupe. Il faut faire les choses par soi-même avant de trouver un manager.
Rodolphe : L’idéal serait d’avoir un tourneur. Mais sur notre style de musique, ce n’est pas facile à trouver.
Vos objectifs pour les prochains mois ?
Rodolphe : Les Rockomotives à Vendôme, fin octobre. Puis monter vers Paris.
Patrice : Et l’enregistrement de l’album. On a sorti un premier trois titres pour faire découvrir plus largement le projet. Ce soir, on joue une douzaine de titres. Donc, il y a de quoi faire pour un album. Le trois titres nous donne l’occasion de ne pas tout montrer tout de suite et de continuer à travailler sur ce qu’on a déjà.
Propos recueillis par Cathy Martineau et Julie Patillot