MISE À MORT DU CERF SACRÉ (Compétition Officielle) (sortie prévue le 1er novembre)
de Yorgos Lanthimos (Colin Farrell, Nicole Kidman, Barry Keoghan)
Chef de file d’un néo-cinéma grec basé sur l’absurde, accompagné d’une certaine violence psychologique, le sieur Lanthimos étonne positivement la plupart du temps.
En 2009, il nous donna l’épatant « CANINE », centré sur des adolescents aux comportements particuliers et, en 2011, le moins réussi « ALPS » malgré quelques attraits indéniables.
Depuis, il est sorti de son pays natal et a décidé de se tenter une carrière dans la langue de Shakespeare, qui débuta avec « THE LOBSTER », fable futuriste brillante mais inégale sur la notion du couple, déjà en compét cannoise et aussi déjà avec Colin Farrell.
Il revient, ici, avec son deuxième projet anglais pour tenter, comme tous ses autres petits camarades, de décrocher la Palme d’or.
Steven, chirurgien réputé, est marié à Anna, ophtalmologue. Leurs enfants, Kim et Bob, âgés respectivement de 14 et 12 ans, donnent entière satisfaction. Depuis quelques temps, Steven fréquente Martin, un ado qui a perdu son père – un ancien patient de notre as du bistouri. Le prenant progressivement sous son aile, il l’invite un jour dans sa maison et lui présente sa famille. Quelques jours plus tard, Bob devient paralysé des jambes et perd tout appétit. Commence alors un cauchemar pour Steven et les siens…
Disons-le d’emblée, voici un très grand film.
Mais à ne pas mettre entre toutes les mains.
Dès la scène d’intro – une simple opération à coeur ouvert en gros plan – le spectateur peut sentir qu’il ne sera pas épargné.
Les premières minutes qui s’ensuivent confirment bien vite cette impression.
Ce qui frappe, avant tout, c’est ce climat d’étrangeté qui va baigner l’ensemble du métrage jusqu’à la toute dernière minute, sans jamais faiblir – au contraire de « THE LOBSTER », qui faiblissait dans sa seconde partie.
Via une utilisation habile et occasionnelle de courtes focales fournissant des angles de vue légèrement déformés, une musique dissonante, des dialogues qui tombent parfois comme un cheveu sur la soupe mais jamais gratuits et amplifiant la bizarrerie, des personnages magnifiquement écrits, des situations bien amenées, et des comédiens monstrueux – et perpétuellement en tension intériorisée – (Farrel, barbu, magnifique, Kidman, toujours aussi digne dans le malheur, le jeune Barry Keoghan, une révélation), Yorgos Lanthimos livre un impressionnant démarquage du « THEORÊME » de Pasolini – auquel on ne peut inévitablement s’empêcher de penser au départ -, forcément tragique, et – saupoudrant son film d’un soupçon de mysticisme voire de religieux mais évitant le piège du crétinisme – malmène, bouleverse et fait flipper.
En gros, « MISE À MORT DU CERF SACRÉ » c’est comme si Haneke – période « FUNNY GAMES » – avait couché avec le Kubrick de « SHINING ».
Donc, président Pedro et votre jury, ce serait bien – svp – de faire preuve d’audace lors de la cérémonie de clôture.
Hélas, je ne crois plus au Père Noël depuis longtemps…
LE REDOUTABLE (Compétition Officielle) (sortie prévue le 13 septembre)
de Michel Hazanavicius (Louis Garrel, Stacy Martin, Bérénice Bejo)
Alors qu’il vient d’achever le tournage « LA CHINOISE », qu’il sort dans la foulée, Jean-Luc Godard, suite à l’échec critique et public s’ensuivant, va se radicaliser et devenir de plus en plus incompréhensible et invivable pour ses proches. Surtout pour Anne, sa femme et muse d’alors…
Se tentant un mix entre les comédies franches qui lui assurèrent le succès comme les « OSS 117 » et le versant dramatique qu’il avait exploré précédemment avec l’insupportable « THE SEARCH », Michel Hazanavicius prend des risques avec ce biopic partiel consacré au principal inventeur de la Nouvelle-Vague.
Malgré Louis Garrel, plutôt crédible grimé en Jean-Luc et Stacey Martin – après « NYMPHOMANIAC » – toujours aussi spontanée à poil, on s’ennuie pas mal car le métrage hésite constamment entre satire et sentimentalisme sans jamais réussir à allier les deux.
Quelques répliques et scénettes provoquent certes un léger sourire – à condition de connaitre un minimum son lexique godardien – mais la platitude de la mise en scène détruit tout.
Alors Michel, t’es « À BOUT DE SOUFFLE » ?
THE MEYEROWITZ STORIES (Compétition Officielle) (date de sortie inconnue)
de Noah Baumbach (Adam Sandler, Ben Stiller, Dustin Hoffman)
Autre production NETFLIX de la sélection, celle-ci n’a pas grand intérêt tant nous sommes confrontés à un sous-Woody Allen peu inspiré – faut-il y voir une volonté des organisateurs de pallier absolument à l’absence du juif new-yorkais à lunette ?
Une tendance à copier le maître que Baumbach (« WE’RE STILL YOUNG ») laissait poindre dans ses précédents opus.
Ici, Adam Sandler et Ben Stiller jouent les fils névrosés d’un Dustin Hoffman, artiste lui aussi pas épargné.
Les acteurs sont bons, la réalisation propre mais, définitivement, non.