LA FORME DE L’EAU – THE SHAPE OF WATER
de Guillermo del Toro (Sally Hawkins, Michael Shannon, Richard Jenkins)
Del Toro est sans doute, actuellement, le plus célèbre des cinéastes barbus hollywoodiens au « léger » embonpoint, avec Peter Jackson.
Mais contrairement au néo-zélandais (qui a bien maigri), notre mexicain de service a presque exécuté un sans-faute derrière la caméra, explorant un univers cohérent et très personnel qui se reflète entre grosses productions particulièrement réussies – « BLADE 2 », « HELLBOY – LES LÉGIONS DE L’OR MAUDITE », « PACIFIC RIM » – que beaucoup ont injustement critiqué, n’ayant rien compris à la chose – et budgets plus modestes, tout aussi remarquables – « LE LABYRINTHE DE PAN », « MIMIC ».
Outre sa prolixe activité de producteur – la sympathique série tv THE STRAIN – et scénariste pour d’autres, il tente de finaliser ses propres envies, qui ne verront pas forcément le jour et ce, malgré sa notoriété.
Exemple fameux : « LES MONTAGNES HALLUCINÉES », d’après la court roman éponyme de Lovecraft – source récurrente d’inspiration du réalisateur – une tentative d’adaptation sans cesse abandonnée et relancée.
L’Arlésienne dans toute sa splendeur.
Espérons que sa version de PINOCCHIO en animation, annoncée comme sombre, aboutisse, tout comme son remake de l’épatant « LE CHARLATAN » (1947) de Edmund Goulding sur la perversion d’un bonimenteur de foire qui prétend lire dans l’esprit des gens.
En attendant, débarque aujourd’hui sur les écrans, son nouveau bébé, qui – depuis qu’il a remporté le Lion d’Or à la dernière Mostra de Venise et fait figure de favori pour les prochains Oscars – a suscité une attente quasi-fiévreuse.
Une bourgade américaine. Début des sixties. Elisa, muette, travaille comme ménagère dans un laboratoire ultra-secret. Un jour, tandis qu’elle lave une salle d’expérience, on y amène une créature, recueillie par l’armée, pour que cette dernière soit étudiée par des savants. Progressivement, va se nouer une relation forte entre l’humaine et le monstre…
Comme son collègue Alfonso Cuarón – et copain d’enfance -, del Toro se plait à ne jamais faire le même film.
Poursuivant sur la veine gothique de son précédent long métrage, « CRIMSON PEAK » – qui possédait d’immenses qualités mais s’avérait imparfait – il rend ici hommage aux heures de gloire de la « UNIVERSAL » des années 30 et après, qui vit l’incarnation des monstres littéraires de Mary Shelley et de Bram Stoker et des avatars ultérieurs comme « L’ÉTRANGE CRÉATURE DU LAC NOIR ».
Présentement, la « chose » en question, c’est Abe Sapiens – personnage qui fait parti intégrante de l’univers d’HELLBOY – imaginé par l’incontournable dessinateur Mike Mignola et dont l’artiste Guy Davis lui a donné ses lettres de noblesse pour son design assez unique.
D’une certaine façon, ce « SHAPE OF WATER » est un spin-off direct des « HELLBOY » réalisés par le sieur Guillermo.
Comme de coutume, notre mexicain de service professe son amour immodéré du 7e art avec une maestria confondante.
Plus que les thématiques abordées – la différence de soi, l’amour envers son prochain, le racisme, l’humanisme -, c’est leur traitement qui fait mouche, que cela soit frontal, transgressif ou déguisé au détour d’une phrases ou deux.
Que ce soit le taf impressionnant sur les couleurs – les diverses nuances de vert caractérisant la psyché des protagonistes -, la magie des décors – l’appartement des héros, le labo, la salle de ciné -, la musique impeccable d’Alexandre Desplat, la composition des acteurs – Sally Hawkins en handicapée et meurtrie de la vie se découvrant, Michael Shannon en agent gouvernemental borné et hypocrite, l’impayable Michael Stuhlbarg en espion russe infiltré en tant que scientifique, Doug Jones sous la défroque de la créature -, tout contribue à asséner une gigantesque gifle d’émotions au spectateur.
J’arrête là, mon thermomètre a explosé…
MOI, TONYA
de Craig Gillepsie (Margot Robbie, Allison Janney, Sebastian Stan)
Derrière ce titre qui fait un peu porno, se cache un biopic partiel sur la patineuse Tonya Harding, une star pas comme les autres – mais n’est-ce pas le propre des vedettes ?
Plutôt que de répondre à cette question philisophico-branlette, rafraichissons-nous la mémoire.
Lors de la présélection aux jeux olympiques de Lillehammer de 1994, on a accusé Tonya d’avoir comploté délibérément contre sa principale concurrente Nancy Kerrigan et d’être responsable de son agression et de sa blessure à coup de barre de fer au genou, afin de l’écarter.
Pourtant, première athlète américaine à avoir réussi le triple axel, Harding loupa le coche à Lillehammer, plombée par le climat délétère dû à cette affaire.
Auteur de l’étrange et intéressant « UNE FIANCÉE PAS COMME LES AUTRES » avec un bon Ryan Gosling , Craig Gillepsie nous donne là une comédie noire, un chouïa trop caricaturale pour convaincre pleinement mais assez salvatrice grâce aux comédiens, épatants, Margot Robbie en tête.
Ça glisse tout seul.
CRIMINAL SQUAD
de Christian Gudegast (Gerard Butler, Pablo Schreiber, Curtis ’50 Cent’ Jackson)
Ce thriller, sentant bon le Jack Daniel’s et la sueur, oppose des flics coriaces et des braqueurs audacieux dans un jeu du chat et la souris viril à souhait.
Gunfights nerveux et sympas – lorgnant quelques coudées en dessous de « HEAT » – n’empêche pas quelques scories au récit, notamment la vie privée de Big Nick, le « héros » – campé par un Gerard Butler des grands jours – aux péripéties classiques et sans enjeux concernant son boulot de policier hardcore.
Suffisamment efficace pour ne pas être criminel..
L’affiche de la semaine : « DEATH WISH » de Eli Roth
Car même si c’est ce tâcheron de Roth aux manettes, admirer Bruce Willis reprendre le flambeau de Charles Bronson – et péter les plombs en cassant les têtes des affreux qui ont fait du mal à sa famille – peut s’avérer réjouissant.
2 comments on "Y’A DU CINÉ DANS L’AIR ! – N°127"
Pacific Rim ????
Gros navet quand même. Merci d’éclairer ma lanterne sur ce naufrage ridicule : musique insupportable, Kaiju Jurassic Park, personnages insipides, scénario indigent. Là pour le coup je ne suis pas d’accord.
Désolé du retard pour la réponse.
J’ai été embarqué par le spectacle du premier Pacific Rim qui ne prend jamais le spectateur pour un imbécile, et qui se situe dans la droite tradition d’un cinéma japonais populaire des années 50-60.