Un festival de la traduction tout bientôt à Paris et sa région pour mettre en valeur le travail de fourmi des traducteurs, deux romans étrangers qui ont bénéficié d’excellents traducteurs et un roman francophone ! Voilà le programme de cette nouvelle série de chroniques où vous plongerez tour à tour dans l’enfer d’une enfance maltraitée, les affres de la jalousie et dans une partie de bras de fer avec des vieux fachos patibulaires ! Bonnes lectures !
Lisa et son frère Ivan sont tous deux militaires en mission en Afghanistan, quand Lisa reçoit un appel lui annonçant la tentative de suicide de leur petite sœur, Marie. Elle prend le premier vol pour le Danemark. Durant toute la durée du vol qui la ramène au pays de son enfance, elle se raconte et dévoile son histoire à Andreas dont elle est secrètement amoureuse…L’histoire de son enfance douloureuse entre un père autoritaire et violent qui ne connait que les cris et les coups comme moyen de communication et une mère maniaco-dépressive manipulatrice … Au milieu de ce couple, quatre enfants, une fratrie unie et solidaire, Ivan et Lisa, les aînés, Peter et Marie les petits dernier. Des enfants qui vivent dans la terreur et la honte et se protègent comme ils peuvent les uns les autres pour survivre à ce climat pesant et anxiogène. Lisa raconte … Son amour pour Vassili qui s’est tué lors d’un parachutage qu’il effectuait en double avec Peter… Peter qui s’en est sorti, mais amputé des deux jambes … Marie, la fragile, l’artiste, tellement douée pour le piano et la musique … Ivan, le rebelle… Et Lisa, en équilibre sur le fil de ses émotions…Le titre du roman d’Anne-Cathrine Riebnitzsky porte bien son nom, car ce sont bien des guerres que Lisa a menées toute sa vie, pour tenter de conserver son équilibre et celui des siens…Un roman d’une force évocatrice incroyable … Les mots sonnent juste, ne cherchent pas à apitoyer le lecteur, ils coupent, tranchent comme un scalpel dans la douleur et la colère de cette femme aussi fragile que courageuse. C’est par les mots et l’amour rédempteur d’Andreas que Lisa retrouvera enfin la paix : avec elle-même et avec son passé… Bouleversant …
Les guerres de Lisa d’Anne-Cathrine Riebnitzsky, Gaïa, 2016 / 22€
Dov et Zahava étaient encore étudiants lorsqu’ils se sont rencontrés à la cantine de leur campus. Leur rencontre a débuté sur une maladresse… Une tasse de café renversée sur le pantalon de Dov, un premier rendez-vous, une étreinte, et Zahava se retrouve enceinte…Après bien des hésitations, elle décide de garder l’enfant, accepte de se marier et bien qu’elle soit athée de se convertir au Judaïsme, la famille de Dov étant très croyante. Dov devient un brillant avocat et Zahava se retrouve mère au foyer avec ses deux enfants. Des décennies plus tard, ils sont maintenant un vieux couple et s’ennuient dans leur routine (Du moins Zahava …) quand en préparant le linge pour faire une lessive, Zahava trouve entortillé dans la bretelle d’un maillot de corps de son mari un long cheveu blond (elle, est très, très brune…) Zahava devient dingue de jalousie, met la maison sens dessus dessous, vide les placards, les tiroirs du bureau de Dov et en pleine paranoïa, bien sûr, voit partout des preuves de l’infidélité de son mari ! Elle va jusqu’à engager un détective privé qui malgré tous ses efforts et ses nombreuses filatures ne trouve aucun élément tangible pour soupçonner Dov de jouer les jolis cœurs. A bout d’arguments, il lui conseille de suivre une psychothérapie… Cinquante minutes, c’est la durée d’une de ces séances où Zahava demeure muette comme une carpe (à la grande exaspération du praticien) mais cogite à fond les turbines dans sa tête ! Dans ce roman inventif et intelligent, passé, présent et personnages s’entrecroisent dans le monologue intérieur de cette femme en pleine introspection, les flashbacks renforçant le sentiment de confusion de Zahava, perdue dans ses convictions et dans ses choix. Même si tout cela a l’air très sérieux, ce roman n’a rien d’austère ! Il est même carrément drôle dans ses situations rocambolesques et ses dialogues où l’humour très fin de Benny Barbash est un pur régal ! Les personnages qui gravitent autour de Zahava sont également irrésistibles : un serrurier habile mais trop curieux, un arménien dans une échoppe où l’on s’attendrait à trouver des Gremlins, le thérapeute qui ne supporte plus ses patients ou bien encore un écrivain totalement insupportable, égocentrique et pleurnichard. Et je ne vous dévoile pas la chute que je trouve particulièrement bien ficelée … Vous l’aurez compris, la lecture de ce roman (qui a duré plus de cinquante minutes) a comblé toutes mes exigences en matière de littérature.
La vie en cinquante minutes de Benny Barbash, Zulma, 2016 / 22€
Victor menait une petite vie paisible à Londres, chez sa logeuse et néanmoins amoureuse Spooner, lorsqu’il reçoit un coup de fil qui va complètement bousculer son existence : la mère de Palmyre lui apprend que sa fille a mystérieusement disparu et le supplie de tout mettre en œuvre pour la retrouver. Adolescent, Victor était très amoureux de Palmyre…Il part donc pour Paris pour tenter d’en savoir un peu plus auprès de la vieille dame et découvre petit à petit des secrets inavouables et bien enfouis depuis des décennies… Il apprend que le père biologique de Palmyre, Octave, est un ancien salopard de la Cagoule qui a commis les pires atrocités pour le compte de l’Action Française … Qu’il a quitté la France pour l’Espagne après la guerre pour fuir l’épuration et que le vieux facho est toujours en vie, quasi centenaire… Victor rencontre Leduc, nonagénaire distingué et meilleur ami d’Octave, un fichu milicien lui aussi, qui propose son aide et ses relations pour retrouver Palmyre … Finie la sérénité et bonjour les emmerdements ! Victor va basculer au cœur d’un cauchemar où il se prendra des gnons et sera poursuivi par une bande de vieux fachos sanguinaires… Un vrai panier de vieux crabes plus pourris les uns que les autres, enrichis sur la vague de la colonisation en servant les pires dictateurs et détenteurs de secrets qui sont autant d’assurances vie et de menaces pour l’équilibre de la république, … Du beau monde ! La disparition de Palmyre a-t-elle un lien avec le passé sulfureux de son géniteur ? C’est ce que va tenter de résoudre Victor, avec l’aide de personnages peu recommandables mais aussi d’amis comme le truculent Huffham, sorte de clodo lettré, d’un avocat qui devient grossier quand il est énervé (et les occasions de l’être ne lui manquent pas), ou encore de Lumina, la colocataire de Palmyre qui manie les armes comme d’autres des aiguilles à tricoter ! Sur un fond grave et sombre, l’auteur réussit le tour de force de faire un roman pétillant et haletant aux traits d’humour irrésistibles. Un premier roman prometteur !
De si vieux ennemis d’Alain Van Der Eecken, Le Rouergue, 2016 / 20€
On ne dira jamais assez l’importance d’une bonne traduction … Tous ceux qui apprécient la littérature étrangère et en lisent régulièrement sont très sensibles à sa qualité Le travail d’un traducteur est bien sûr de respecter la langue, de la mettre en valeur, mais aussi de respecter l’essence même de l’auteur. Exercice difficile s’il en est ! Cette deuxième édition du printemps de la traduction vous propose conférences, lectures, tournois de poèmes, rencontres en librairie et même des ateliers de traduction. L’occasion idéale de rencontrer et d’échanger avec des traducteurs de différentes langues dans une ambiance conviviale ! Entre Paris, Gif sur Yvette et Montreuil, ce printemps de la traduction se déroulera du 25 au 29 mai 2016. Pour tout renseignement, vous pouvez appeler au 04 90 52 05 50 ou aller directement sur le site pour consulter le programme !